80 ans après Hiroshima : le spectre d’une guerre nucléaire à nouveau crédible ?

Ce mercredi à 8h15 heure locale, la cloche du Mémorial de la paix d’Hiroshima a retenti. La ville s’est figée, comme chaque 6 août, en hommage aux dizaines de milliers de victimes du premier bombardement atomique de l’histoire humaine, survenu à cette même heure en 1945.

80 ans après le largage de la bombe « Little Boy » par un bombardier américain, le monde commémore, mais s’interroge aussi. Car si l’horreur nucléaire appartient officiellement au passé, la menace, elle, n’a jamais complètement disparu. Et à l’heure où les tensions géopolitiques se durcissent sur plusieurs fronts, le spectre d’un recours à l’arme nucléaire ne relève plus uniquement de la fiction ou de la dissuasion théorique.

1945-2025 : De l’horreur à l’équilibre fragile

Le 6 août 1945, à 8h15 du matin, l’histoire a basculé. En quelques secondes, Hiroshima a été anéantie. Plus de 140 000 personnes périront à cause de l’explosion, des radiations et de leurs effets à long terme. Trois jours plus tard, Nagasaki subira le même sort.

En lançant ces bombes, les États-Unis mettaient fin à la Seconde Guerre mondiale — et ouvraient une ère nouvelle, celle de la menace nucléaire permanente. Une arme capable d’anéantir des villes entières en un seul souffle. Une arme de destruction totale, mais aussi, depuis la guerre froide, un outil de dissuasion géopolitique.

2025 : Une dissuasion qui s’effrite ?

Aujourd’hui, neuf puissances détiennent officiellement l’arme nucléaire : les États-Unis, la Russie, la Chine, la France, le Royaume-Uni, l’Inde, le Pakistan, Israël (de manière non déclarée), et la Corée du Nord. À cela s’ajoutent des pays technologiquement capables d’en développer, mais qui s’en abstiennent jusqu’ici.

Longtemps, la doctrine MAD (Mutual Assured Destruction – destruction mutuelle assurée) a tenu lieu de garde-fou. Aucun État rationnel ne lancerait une arme nucléaire, car la riposte serait immédiate et catastrophique.

Mais depuis quelques années, cette logique vacille. La guerre en Ukraine, les tensions croissantes entre la Chine et Taïwan, la multiplication des essais nord-coréens, la doctrine nucléaire floue d’Israël ou encore les ambiguïtés américaines sur le “first strike” relancent une question inquiétante : et si la dissuasion échouait ?

Des signaux alarmants, une diplomatie impuissante

Les grandes conférences de désarmement sont au point mort. Les traités historiques — comme le New START entre Moscou et Washington — sont en danger ou déjà suspendus. La Russie a évoqué, à plusieurs reprises, la possibilité de recourir à l’arme nucléaire tactique dans le conflit ukrainien.

La Corée du Nord multiplie les tests. L’Iran demeure dans une zone grise stratégique mais toujours aucun mot sur le nucléaire israélien . Et Et pendant ce temps, la prolifération s’accélère en silence, portée par des logiques d’alliances, de rivalités et de course aux armements.

Un monde plus instable, donc plus dangereux ?

Le monde de 2025 n’est plus celui de 1945. Il est plus connecté, plus fragile, plus imprévisible. Les conflits sont hybrides, les États parfois affaiblis ou dirigés par des régimes autoritaires instables. La tentation du coup de force nucléaire pourrait venir non d’une stratégie longuement mûrie, mais d’une décision brutale, émotionnelle, ou désespérée.

Dans ce contexte, l’anniversaire des bombardements d’Hiroshima et Nagasaki n’est pas qu’un devoir de mémoire. C’est un signal d’alarme.

Vers une nouvelle mobilisation internationale ?

Malgré les tensions, des voix s’élèvent. Au Japon, pays victime mais non doté de l’arme nucléaire, le Premier ministre a appelé à relancer le désarmement mondial. En Europe, des mouvements citoyens, des ONG et certains diplomates appellent à renouer avec une logique de dialogue et de contrôle des armements.

Mais pour l’instant, les discours humanistes peinent à rivaliser avec les logiques de puissance.

Hiroshima, mémoire brûlante d’un avenir incertain

80 ans après Hiroshima, l’humanité se trouve à une croisée des chemins. Soit elle tire enfin toutes les leçons de l’Histoire pour construire un cadre international crédible, fort, équitable et contraignant.

Soit elle continue de jouer avec une épée de Damoclès que la technologie rend chaque jour plus sophistiquée, plus rapide… et plus incontrôlable. Mais les Commémorer Hiroshima, ce n’est pas pleurer le passé. C’est s’alarmer pour l’avenir .

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