Tebboune trace sa ligne rouge : souveraineté sans compromis, ouverture sous condition

Hier, face à une presse nationale suspendue à ses réponses, le président algérien Abdelmadjid Tebboune a déroulé, en près d’une heure et trente minutes , sa vision de l’Algérie dans le tumulte international. L’entretien, très attendu, a dessiné une diplomatie offensive, centrée sur la souveraineté, le non-alignement et la consolidation d’une puissance économique émergente.
Non-alignement, mais pas neutralité
Loin des postures ambiguës, Tebboune a réaffirmé l’ADN diplomatique de l’Algérie : ni alignée ni passive. Le message est clair : l’Algérie n’entend se soumettre à aucune influence étrangère, qu’elle vienne de Paris, de Washington ou de Pékin. Elle revendique une diplomatie digne, active, et protectrice de ses frontières comme de ses principes.
Concernant les voisins du Sahel – Mali, Niger, Burkina Faso – le président a rejeté toute forme d’ingérence, mais s’est dit prêt à intervenir en médiateur “si les peuples le demandent”. Une manière habile de maintenir le cap de la non-ingérence tout en se positionnant comme acteur incontournable de la stabilité régionale.
Frontières sous haute vigilance
La sécurité nationale reste une obsession. « Nos frontières sont protégées », a martelé le Président algérien , mettant en avant l’expertise algérienne en matière de lutte antiterroriste. Entre les lignes, on comprend que l’armée est en alerte, notamment face à la volatilité des régimes de transition au sud, et à des tensions non dites avec certains pays européens.
Puissance économique émergente
Plus inattendu, c’est sur le terrain économique que le chef de l’État a le plus surpris. Se décrivant comme porteur d’un tournant majeur, il a affirmé que l’Algérie est en passe de devenir une “puissance économique incontournable”, attirant la confiance des institutions financières internationales. Il a aussi évoqué la nécessité de formaliser l’économie informelle, une démarche aussi politique que fiscale.
Concernant la surtaxe américaine de 30 % sur certains produits algériens, il a minimisé son impact, tout en défendant la liberté souveraine de l’Algérie dans ses choix économiques.
Bruxelles dans le viseur
Autre sujet brûlant : l’accord d’association avec l’Union européenne, paraphé en 2002. En réponse à la procédure d’arbitrage lancée par Bruxelles début juillet, Tebboune a parlé sans détour : l’accord est déséquilibré, il doit être renégocié. Le ton n’était ni diplomatique ni vague. Il était celui d’un chef d’État qui ne veut plus que l’Algérie joue les partenaires de seconde zone.
Un repositionnement mondial
Dans un monde multipolaire en mutation, l’Algérie joue la carte du rééquilibrage stratégique. Des liens sont renforcés avec l’Asie (Indonésie, Malaisie), les BRICS, mais aussi certains pays africains clés. Tebboune esquisse une Algérie-pivot, entre Méditerranée, Afrique et monde arabe.
La conférence de presse du 18 juillet est bien plus qu’un exercice de communication. Elle marque un tournant. Le chef de l’état ne cherche plus à rassurer l’extérieur, mais à affirmer un cap. Celui d’un pays qui n’accepte ni l’alignement, ni la marginalisation. Qui tend la main à ses voisins mais garde l’autre sur le levier de souveraineté.
L’Algérie de 2025 veut compter, sans se laisser compter.