Téhéran sous tension : l’ombre d’un conflit ouvert entre Israël et l’Iran

Photo de gauche à droite : Mohammad Mehdi Tehranchi, physicien théoricien, président de l’Université Azad, et Fereydoon Abbasi Davani, ancien directeur de l’Organisation de l’Énergie Atomique iranienne
La nuit a été longue à Téhéran. Plusieurs explosions ont retenti dans la capitale iranienne, provoquant stupeur et confusion. Si les autorités n’ont pour l’instant fourni aucune explication officielle, tout porte à croire qu’il s’agit de frappes israéliennes, marquant une escalade inédite dans les tensions qui opposent depuis des années l’État hébreu à la République islamique.
Quelques heures après les premières détonations, le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahou a pris la parole. « L’opération durera autant de jours que nécessaire », a-t-il déclaré d’un ton ferme, sans entrer dans les détails. En face, l’Iran a répliqué presque immédiatement, promettant une réponse « ferme et proportionnée ». Le ton est donné, et le monde retient son souffle.
Depuis plus d’une décennie, Israël et l’Iran mènent une guerre discrète, faite d’assassinats ciblés, de cyberattaques et d’affrontements par procuration en Syrie ou au Liban. Mais les événements de cette nuit marquent une rupture : pour la première fois, des frappes semblent avoir visé directement le cœur du territoire iranien. Ce franchissement de ligne rouge place la région sur une pente dangereusement glissante.
Parmi les cibles de cette offensive figurent deux personnalités majeures du paysage scientifique iranien. Fereydoon Abbasi Davani, ancien directeur de l’Organisation de l’Énergie Atomique iranienne, et Mohammad Mehdi Tehranchi, physicien théoricien et président de l’Université Azad, ont été tués lors des frappes. Leur disparition représente un coup dur pour l’élite technoscientifique iranienne et ajoute une dimension symbolique à l’attaque : celle d’un message clair adressé à Téhéran sur ses ambitions nucléaires et ses capacités scientifiques.
La crainte d’un embrasement généralisé est dans tous les esprits. Si le Hezbollah, allié de Téhéran au Liban, décidait d’ouvrir un front nord contre Israël, le conflit pourrait rapidement s’étendre. De même, en Syrie et en Irak, les nombreuses milices chiites soutenues par l’Iran disposent de la capacité de frapper, notamment contre des intérêts israéliens ou américains. Dans les rues de Bagdad comme dans les salons feutrés de Doha, les chancelleries s’activent pour contenir la tempête.
Mais les répercussions dépassent de loin le Moyen-Orient. Toute flambée entre Téhéran et Tel-Aviv a des effets directs sur l’économie mondiale. Déjà, les prix du pétrole ont bondi sur les marchés asiatiques, par crainte d’un blocage du détroit d’Ormuz. Les grandes capitales occidentales, de Washington à Bruxelles, redoutent une déstabilisation durable, à la fois énergétique et sécuritaire. Le risque est d’autant plus grand que ce conflit pourrait raviver les lignes de fracture géopolitiques : les États-Unis, alliés historiques d’Israël, devront jongler entre leur soutien à Netanyahou et leur volonté d’éviter un embrasement global. La Russie et la Chine, quant à elles, pourraient saisir cette crise comme une opportunité pour renforcer leur influence dans la région.
Au-delà des considérations stratégiques, cette guerre naissante pose aussi la question des intentions politiques de part et d’autre. En Iran, le pouvoir, fragilisé par des mois de contestation sociale, pourrait être tenté d’utiliser cette attaque comme un levier de cohésion nationale. En Israël, Benyamin Netanyahou fait face à une fronde intérieure et à une coalition parlementaire vacillante. Une opération militaire d’envergure pourrait lui redonner un semblant d’autorité dans un climat politique délétère.
Pour l’heure, la diplomatie semble dépassée. L’Europe, qui peine à parler d’une seule voix, appelle à la retenue, sans pouvoir peser véritablement sur les décisions. Seules quelques puissances régionales, comme le Qatar ou la Turquie, maintiennent des canaux de communication ouverts avec les deux camps. Leur rôle pourrait s’avérer décisif dans les heures à venir.
Le Moyen-Orient est de nouveau au bord du gouffre. Si les armes continuent de parler plus fort que les mots, le risque d’un conflit ouvert entre Israël et l’Iran n’est plus une hypothèse, mais une possibilité réelle. Le monde entre dans une zone de turbulences aux conséquences potentiellement dévastatrices.