France – Algérie : silence persistant autour du nucléaire

L’histoire continue de peser lourd, notamment celle de l’utilisation du Sud algérien comme terrain d’expérimentation pour la bombe atomique française entre 1960 et 1966. Parmi les épisodes les plus marquants, le tir Béryl du 1er mai 1962, qui a viré au désastre. Le site d’In Ekker, situé dans le Hoggar, a été transformé en dépotoir pour nos déchets radioactifs. Ce jour-là, les populations locales, tout comme les civils et militaires présents, ont été exposés – bien malgré eux – non pas à une mort immédiate, mais à une irradiation progressive, causée par le nuage radioactif échappé de la montagne Tan Affela. L’ampleur de l’accident reste encore aujourd’hui minimisée. Plus de soixante ans après, les victimes de ces essais nucléaires demeurent les grandes oubliées de la période coloniale en Algérie.

Le 19 février dernier, j’ai été invité à témoigner sur les conséquences radioactives du tir Béryl dans l’émission de Lila Lefèvre, Le Vrai Dialogue, diffusée sur Atipik TV, une chaîne de télévision belge francophone internationale. L’émission a rencontré un large écho, notamment en Algérie. En revanche, en France, elle n’a suscité aucune réaction dans l’espace médiatique. Doit-on y voir une forme d’autocensure, voire de censure dictée par l’appareil d’État, dépendant du bon vouloir du président de la République ? Aucun média français, qu’il soit radiophonique ou de presse écrite, n’a relayé ces informations. À titre d’exemple, un grand quotidien du soir, qui en 2011 avait mis en lumière le drame des irradiés de Béryl, a récemment couvert en détail la rupture des relations diplomatiques entre la France et l’Algérie, sans pour autant évoquer le passif nucléaire.

Sur France Culture, dans l’émission matinale animée par Guillaume Erner, l’historien Benjamin Stora a brièvement mentionné, en toute fin d’intervention, le coût très élevé du nettoyage des déchets radioactifs, glissant à peine un mot sur les victimes. Par la suite, dans une interview à l’Agence France-Presse, il a plaidé pour des initiatives visant à renouer les liens avec l’Algérie, sans un mot sur les essais nucléaires ou sur la responsabilité morale et historique de la France.

Il semble que les conséquences de nos essais nucléaires resteront, encore longtemps, un point de friction majeur entre la France et l’Algérie.

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