Meloni, Tebboune et Léon XIV construisent des ponts, Macron érige des murs

Une séquence inédite entre Alger, Rome et le Vatican
Le déplacement de Tebboune à Rome a été marqué par des entretiens avec la présidente du Conseil Giorgia Meloni, des responsables militaires italiens, puis — point culminant — la visite prévue aujourd’hui auprès du pape Léon XIV. Le souverain pontife connaît bien l’Algérie. Avant son élection en 2024, il s’y est rendu à deux reprises pour se recueillir sur la tombe de Saint Augustin à Annaba, dans la basilique qui lui est dédiée. Mais jamais, jusqu’à présent, un pape n’a été invité officiellement à visiter l’Algérie en tant que chef de l’Église catholique. Si Léon XIV accepte, ce serait une grande première mondiale.
« Je suis le fils de Saint Augustin »
Ce pape n’est pas anodin. Dès son premier discours, il s’était défini ainsi : « Je suis le fils de Saint Augustin », hommage retentissant au philosophe et évêque né à Souk Ahras, dans l’est algérien. Avec Saint Augustin, l’Algérie possède une figure universelle, un pont vivant entre l’Afrique du Nord et Rome, entre l’islam et la chrétienté. Et avec Léon XIV, le Vatican envoie un message de réconciliation historique et de mémoire partagée.
L’Algérie, une terre millénaire, fière de ses racines
L’entretien au Vatican devrait également rappeler que l’Algérie ne se résume pas à sa période coloniale. Cette terre a offert à Rome des saints, des philosophes, et même un empereur romain : Macrin, né à Cherchell. Aujourd’hui encore, malgré une population majoritairement musulmane, la Constitution algérienne garantit la liberté de culte. Une minorité chrétienne algérienne vit paisiblement dans plusieurs régions, et les lieux saints — comme la cathédrale Saint-Augustin d’Annaba — témoignent d’un passé chrétien profondément enraciné. Tebboune veut mettre cet héritage en valeur et placer l’Algérie comme un carrefour spirituel, et non un terrain de tensions confessionnelles.
Un potentiel touristique et culturel considérable
Si le pape Léon XIV répond favorablement à l’invitation, les retombées touristiques pourraient être majeures : développement du tourisme religieux (Souk Ahras, Annaba, Tipasa, Timgad, Djemila), renaissance des itinéraires augustiniens pour pèlerins, historiens, universitaires, valorisation du patrimoine paléochrétien et antique, encore peu connu du grand public. L’Algérie possède une richesse patrimoniale sous-exploitée, et une telle visite papale pourrait servir de déclencheur mondial.
Pendant ce temps, Paris érige des murs
Le contraste avec la France est saisissant. Alors que Rome multiplie les gestes d’ouverture, Paris poursuit son isolement diplomatique avec Alger, minée par : les réseaux nostalgiques de l’Algérie française, les lobbies néocoloniaux, les discours hostiles de l’extrême droite et des ministres comme Gérald Darmanin ou Bruno Retailleau, les médias de Vincent Bolloré, qui caricaturent et attaquent l’Algérie à longueur d’antenne. Macron, en cinq ans, a vu tous les grands contrats algériens échapper à la France : énergie, infrastructures, sécurité. Les Italiens, eux, avancent à visage découvert, sur un modèle de respect mutuel et d’intérêts partagés.
Rome avance, Paris recule
Giorgia Meloni et Abdelmajid Tebboune se retrouvent sur une vision méditerranéenne où l’Afrique du Nord n’est plus perçue comme une périphérie, mais comme un partenaire d’égal à égal. L’Italie devient, en quelque sorte, le pont manqué de la France. Dans cette nouvelle équation, le pape Léon XIV ne serait pas qu’un hôte en Algérie. Il serait un pèlerin en terre augustinienne, un symbole vivant de paix, de mémoire et de respect mutuel. S’il foule un jour le sol algérien en tant que pape, ce sera l’événement le plus fort depuis Jean-Paul II à Casablanca en 1985. Et ce sera surtout la consécration d’un monde méditerranéen multipolaire, où l’Algérie joue enfin à son rang.