Visite de Macron à Mayotte : Entre déconnexion et humiliation
Cet article a été rédigé par notre correspondant basé à Mayotte, qui a préféré rester anonyme afin d’éviter d’éventuelles représailles de la part de l’État central.
La récente visite d’Emmanuel Macron à Mayotte a laissé un goût amer parmi les habitants de l’archipel français de l’océan Indien. Lors de son passage, le président français a tenu des propos qui ont résonné comme une humiliation : « Soyez heureux d’avoir à boire et à manger grâce à la France, vous vivez dix fois mieux que les autres régions de l’océan Indien. » Une déclaration qui a suscité une vive indignation et renforcé le sentiment d’abandon ressenti par de nombreux Mahorais.
Une visite post-cyclonique marquée par l’indifférence
La venue du président français est intervenue peu de temps après le passage dévastateur du cyclone Chido, qui a ravagé Mayotte, causant des dégâts matériels considérables et aggravant une situation humanitaire déjà fragile. Les infrastructures, déjà précaires, ont subi des dommages importants, laissant de nombreux habitants sans abri, sans accès à l’eau potable et dépendants de l’aide d’urgence. Pourtant, cette catastrophe semble n’avoir été qu’un sujet secondaire lors de la visite présidentielle, alors qu’elle aurait dû être au cœur des discussions et des mesures annoncées.
Un quotidien marqué par les inégalités
Mayotte, bien que département français depuis 2011, reste l’un des territoires les plus pauvres de la République. Avec un salaire moyen de 200 euros, largement inférieur à celui de la métropole et même en dessous de certains pays africains sous-développés, les Mahorais peinent à comprendre pourquoi l’État français n’investit pas davantage pour réduire ces écarts criants.
L’accès à l’eau potable, à l’éducation et aux soins de santé demeure un défi quotidien pour beaucoup. Les infrastructures sont souvent obsolètes, et les services publics saturés ne répondent pas aux besoins croissants d’une population en forte augmentation.
Une France honteuse face à son incapacité à agir
Des experts français et des voix politiques n’ont pas caché leur malaise face à cette situation. Ils expriment leur honte de voir une grande puissance économique mondiale incapable de répondre aux besoins fondamentaux d’une partie de ses propres citoyens.
Certains observateurs pointent du doigt une volonté politique insuffisante, voire un désintérêt total pour le sort des Mahorais, les considérant comme des citoyens de “seconde zone”.
Le référendum de 2009 : Une question de regrets ?
En 2009, les Mahorais avaient massivement choisi de rester français lors du référendum sur la départementalisation. Quinze ans plus tard, nombreux sont ceux qui se demandent si ce choix était le bon. L’état des lieux actuel nourrit un débat grandissant sur l’opportunité d’une indépendance ou d’un statut spécifique plus autonome.
De leur côté, les mouvements indépendantistes, bien que minoritaires, voient leurs rangs se renforcer à mesure que le déséquilibre social et économique s’aggrave.
Pourquoi la France ne développe-t-elle pas ses départements d’outre-mer ?
La question du sous-investissement dans les départements d’outre-mer n’est pas propre à Mayotte. Des territoires comme la Guyane ou la Martinique souffrent également de problèmes structurels similaires.
Cependant, à Mayotte, la situation est particulièrement critique. Le niveau de vie y est dix fois inférieur à celui de la métropole, et les solutions politiques semblent aussi lointaines que les milliers de kilomètres qui séparent l’archipel de Paris.
Une fracture grandissante
La visite d’Emmanuel Macron à Mayotte a laissé une empreinte douloureuse dans les esprits. Plutôt que d’apaiser les tensions et de proposer un plan d’action clair pour le développement du territoire, le président français a semblé aggraver une fracture déjà profonde.
Les Mahorais attendent des actes concrets, pas des discours condescendants. L’avenir de Mayotte dépendra de la capacité de la France à respecter ses engagements envers ce territoire, qui reste, malgré tout, un bout de la République au milieu de l’océan Indien.