Algérie : le labyrinthe administratif ou comment le citoyen se perd dans les promesses non tenues

En Algérie, la bureaucratie est devenue un fléau national, un véritable système de découragement institutionnalisé. Le citoyen n’est plus servi par l’administration, il est piégé par elle. Pourtant, les promesses ne manquent pas. Le président Abdelmadjid Tebboune a fait de la numérisation et de la modernisation de l’administration une priorité nationale. Il a tenu sa parole sur le plan stratégique, multipliant les instructions, les directives et les engagements publics. Mais sur le terrain, les ministères, les directions générales et les administrations locales font la sourde oreille, freinant toute tentative de réforme.

L’exemple édifiant du livret foncier: l’établissement du livret foncier nécessite, lui-même, le livret foncier !!!

Prenons un cas concret : obtenir un livret foncier en Algérie. En théorie, les démarches sont claires. En pratique, elles relèvent de l’épreuve d’endurance. Chaque document demandé pour l’établissement du livret nécessite, lui-même, le livret foncier. C’est un cercle administratif vicieux, une boucle absurde qui pousse les citoyens à l’abandon ou à la corruption.

Les guichets du cadastre, de la conservation foncière, les services des domaines ou les notaires publics deviennent alors des points de friction, où le citoyen doit souvent passer par le bakchiche ou user de relations pour débloquer une situation. Non pas à cause de l’absence de textes, mais parce que l’application de la loi est à géométrie variable.

Un président seul contre l’inertie ?

Le président Tebboune a donné l’impulsion, les directives sont claires, les priorités sont posées. Mais l’appareil étatique ne suit pas. Faut-il donc se poser la question : doit-on sanctionner les ministères et administrations qui sabotent la réforme par inertie ? Ou, à l’inverse, récompenser ceux qui appliquent avec rigueur les décisions présidentielles ? Car aujourd’hui, l’État fonctionne à deux vitesses. D’un côté, un cap fixé depuis le sommet ; de l’autre, des rouages intermédiaires qui ralentissent, voire bloquent, tout progrès.

Les médias : les grands absents

Autre problème majeur : le silence des médias. Là où ils devraient alerter, expliquer, dénoncer, ils se contentent souvent de relayer des communiqués sans poser les vraies questions. Le rôle de vulgarisation et d’accompagnement du citoyen n’est pas rempli. On parle de réformes, mais personne n’explique comment faire valoir ses droits ou comment signaler les abus. Le peuple est laissé seul face à un mur d’incompréhension et d’inertie.

Rigueur, contrôle et responsabilité

Face à cette situation, il est temps que le président redouble de rigueur, de sévérité et de contrôle. Il ne suffit plus de tracer le chemin, encore faut-il s’assurer que les ministères marchent dans la même direction. Cela passe par une évaluation continue des administrations, des audits transparents, et pourquoi pas une instance indépendante chargée de surveiller la mise en œuvre des réformes.

Sans cela, l’Algérie restera figée dans une logique où l’État annonce, mais ne transforme pas ; où les citoyens espèrent, mais se heurtent à des murs ; où les lois existent, mais ne s’appliquent que selon l’humeur d’un guichet.

Il ne s’agit plus seulement de réformer. Il faut refonder. Redonner confiance au citoyen, restaurer l’efficacité de l’action publique, et surtout, rappeler que la bureaucratie ne doit jamais devenir un pouvoir au-dessus du pouvoir. Car une administration qui bloque l’État est une menace plus grande que l’inaction : c’est une trahison silencieuse du projet national.

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