Algérie : Macron parade avec Sansal… et enterre les irradiés

L’écrivain franco-algérien Boualem Sansal, Français de fraîche date, vient d’être libéré après une année d’emprisonnement. Condamné pour avoir attribué à la puissance coloniale le tracé de la frontière entre l’Algérie et le Maroc, il n’a finalement purgé qu’une partie de sa peine grâce à une grâce présidentielle.

Âgé et malade, son cas a suscité en France une vague de protestations. Le monde intellectuel, notamment, a pressé Emmanuel Macron d’intervenir au nom de la liberté d’expression , surtout lorsqu’un écrivain est concerné. On se souvient que de Gaulle, interrogé à propos de Sartre, avait asséné : « On n’emprisonne pas Voltaire ».

À peine revenu en France, Sansal a été reçu à l’Élysée avec son épouse.

Ce geste intervient pourtant au plus mauvais moment dans les relations déjà délabrées entre Paris et Alger. Et il suscite, pour ma part, plusieurs réserves.

Une opération d’image, rien de plus

Officiellement, Macron honore un écrivain. En réalité, il signe un coup de communication de plus, une mise en scène destinée à polir une image présidentielle abîmée.

Quant à Sansal, écrivain algérien avant tout, il s’est montré bien silencieux sur un pan crucial de l’histoire franco-algérienne : l’appropriation du Sahara par la France pour y réaliser ses premiers essais nucléaires, à Reggane puis à In Ekker.

Les conséquences — irradiations des populations sahariennes, blessures invisibles, pollution durable du Hoggar — constituent une dette morale immense envers le peuple algérien et les communautés touarègues. Sansal aurait pu rappeler ce devoir de mémoire. Il ne l’a pas fait.

Les grands sacrifiés : les irradiés français oubliés

De son côté, Emmanuel Macron porte une autre dette, en France cette fois : celle envers les appelés du contingent envoyés dans le désert pour participer à ces essais nucléaires. Des jeunes hommes exposés sans protection, dont beaucoup ont été brisés à vie.

En huit ans à l’Élysée, jamais le président n’a trouvé une heure pour recevoir l’AVEN — l’Association des vétérans des essais nucléaires.

Aucun geste, aucune reconnaissance.

Rien pour ceux que la République a envoyés se sacrifier au nom de sa puissance atomique.

Aujourd’hui, presque tous sont morts. Une simple reconnaissance aurait pourtant allégé, ne serait-ce qu’un instant, le poids de cette injustice abyssale.

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