Cette 5ème République, incarnée sans état d’âme par ses chefs d’État successifs, de De Gaulle à Macron, n’a ni souhaité ni eu la volonté de solder le passé des six années d’essais nucléaires menés de 1960 à 1966 dans le Sahara algérien. Leurs retombées radioactives, aggravées par une série d’échecs lors des essais souterrains dans le Hoggar, ont durablement affecté la santé des populations touarègues ainsi exposées, sans compter le personnel civil et militaire — dont une partie composée d’appelés du contingent.

La gravité des maladies engendrées se mesure à l’aune d’une liste non exhaustive de vingt-trois types de cancers attribués à la radioactivité. À ces cancers s’ajoutent les malformations observées chez les enfants des irradiés. Au-delà du bilan humain, nos essais ont contaminé pour des millénaires le sable du désert et le granit des massifs montagneux.

En 2020, le chef de l’État a confié à Benjamin Stora, historien reconnu de la colonisation française en Algérie, la mission de proposer des pistes pour une réconciliation des mémoires douloureuses de notre passé colonial — un passé qui, soixante-trois ans après l’indépendance, continue d’alimenter la rancœur d’une grande partie de la jeunesse algérienne à notre égard.

Remis en janvier 2021, le rapport de Benjamin Stora, fort de vingt-deux recommandations, n’aborde pourtant qu’à la marge la question des dommages subis par l’Algérie du fait de l’exposition de son espace saharien et de ses populations à nos essais nucléaires. Le Président de la République comme son entourage élyséen se sont appuyés sur ce rapport ainsi édulcoré pour maintenir un mur du silence sur nos responsabilités envers l’État algérien.

Or, la 5ème République est aussi un régime parlementaire. Et mieux vaut tard que jamais : il revient aujourd’hui à l’Assemblée nationale, tout comme au Sénat, de diligenter une enquête indépendante sur les réparations dues à l’Algérie, utilisée — en tant que territoire colonisé — pour permettre à la France d’acquérir la bombe atomique et d’accéder au rang de puissance mondiale. La loi Morin de janvier 2010, censée indemniser les victimes françaises, n’aura été qu’un pis-aller au regard des souffrances endurées par les irradiés.

Ceci est un appel, au nom de mes camarades irradiés tombés dans l’oubli, hormis pour leurs familles, aujourd’hui représentées par leurs descendants.

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