Le dernier silence : Davignon face au fantôme de Lumumba

Plus de soixante ans après l’assassinat de Patrice Lumumba, la justice belge ose enfin murmurer ce que tant redoutaient d’entendre à haute voix : il est peut-être temps de juger. Ce lundi, le parquet fédéral demande le renvoi en correctionnelle d’Étienne Davignon, 92 ans, pour crimes de guerre. L’ancien diplomate stagiaire est le dernier vivant parmi ceux que la famille Lumumba accuse d’avoir orchestré, permis ou simplement regardé mourir le rêve d’un Congo libre.

Lumumba n’était pas parfait, mais il était libre. Il parlait d’indépendance, de dignité, de justice. Pour cela, il a été traqué, humilié, torturé, assassiné. Le 17 janvier 1961, au Katanga, avec deux de ses compagnons, il est tombé. Pas seulement sous les balles, mais sous le poids d’un système colonial qui refusait de mourir.

En 2001, la Belgique a parlé de “responsabilité morale”. En 2022, elle a rendu une dent à la famille. Aujourd’hui, elle doit peut-être rendre la vérité.

Davignon nie. Il était jeune, il obéissait. Mais peut-on rester neutre quand l’innocence est crucifiée par la raison d’État ? À 92 ans, il reste l’ultime visage d’un mensonge d’État trop longtemps étouffé. Un procès ne ramènera pas Lumumba. Mais il dira, peut-être pour la première fois : “Nous savions. Nous avons laissé faire.”

L’histoire ne demande pas vengeance. Elle réclame justice. Enfin.

A propos de l'auteur

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *