Goncourt 2024 : Quand la politique prend le pas sur la littérature, les houris dansent, les vrais talents ignorés
La remise du Prix Goncourt à Kamel Daoud pour Houris suscite un débat : ce prix récompense-t-il encore les qualités littéraires, ou sert-il davantage des intérêts politiques et diplomatiques ? Cette remise en lumière des blessures de l’Algérie, à travers le récit d’une décennie noire, semble un choix plus symbolique que littéraire, un geste où la littérature passe au second plan. Dans cette dynamique, le vrai talent, l’écrivain qui mériterait amplement cette récompense, reste selon moi Yasmina Khadra, dont l’œuvre profonde et acclamée n’a jamais été distinguée par le Goncourt.
Ancien commandant de l’armée algérienne, Yasmina Khadra n’a jamais caché ses origines ni son passé militaire, une double dimension qui pourrait expliquer le manque de reconnaissance en France. Son parcours l’inscrit en effet dans une Histoire où l’Algérie s’est affranchie de la tutelle française, et son succès littéraire mondial dérange autant qu’il fascine. Contrairement à d’autres, Khadra n’a jamais transigé ni renié ses racines pour obtenir une approbation internationale. Pour moi, il est évident que ses talents littéraires sont éclipsés par des considérations politiques et historiques : voir la France couronner un ancien militaire algérien, c’est encore un tabou.
D’un autre côté, la journaliste et militante Zineb El Rhazoui, autrefois érigée en symbole pour son courage face au terrorisme islamiste, a fait l’amère expérience de ces limites invisibles. Alors qu’elle critiquait des idéologies extrémistes, elle était saluée et largement médiatisée. Mais dès qu’elle s’est exprimée en faveur des droits palestiniens, la donne a changé. Ses propos, jugés dérangeants, lui ont valu une mise à l’écart rapide et sans appel. Ce changement de traitement souligne les frontières implicites de la liberté d’expression, qui reste bien souvent conditionnelle.
Kamel Daoud, lui, se trouve aujourd’hui au cœur des projecteurs et jouit du prestige qu’apporte le Goncourt. Cependant, pour combien de temps ? Le système qui l’acclame pourrait se retourner contre lui s’il venait à sortir des lignes tracées. Si l’Histoire récente nous enseigne une leçon, c’est bien celle-ci : ceux qui s’éloignent du discours attendu sont vite exclus, comme l’a été Zineb.
Ainsi, la France des Lumières semble perdre son cap, sa neutralité et son indépendance intellectuelle, écartant ceux qui osent parler pour saluer des choix de plus en plus dictés par des intérêts. En bout de course, la littérature, dans ce cadre, risque de n’être plus qu’un outil, et les écrivains, qu’ils s’appellent Yasmina Khadra ou Kamel Daoud, des acteurs remplaçables d’une scène plus politique que littéraire.
merçi infiniment Lila de commenter sur les discours de nos anciens dirigeants de leurs bavures et de leur ignorance