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Analyse de l’interview du prince Mohammed Ben Salmane sur Fox News Channel (1ère partie)

Le Prince a parlé avec confiance et optimisme du présent et de l’avenir du pays et a abordé des sujets politiques très importants dans le cadre de ses réponses aux questions posées, notamment les relations régionales et internationales, les ambitions économiques et les possibilités de normalisation avec Israël.

L’interview elle-même est considérée comme une indication supplémentaire d’amélioration et de détente dans les relations entre les parties saoudienne et américaine, dans une mesure qui permet de la décrire comme une annonce selon laquelle la normalisation saoudo-américaine a atteint un sommet qu’elle n’avait pas atteint depuis que Biden est arrivé au pouvoir.

Il semble que chaque partie ait réalisé qu’elle ne pouvait pas se passer de l’autre, même si l’Arabie Saoudite en particulier a accompli un changement important dans sa politique, s’éloignant des désirs et des intérêts de Washington. Le plus marquant est peut-être la diversité de ses relations internationales. Sa tentative de construire un État institutionnel doté d’une économie flexible qui ne dépend pas exclusivement du pétrole en est un exemple.

L’Amérique, incapable de subjuguer et de monopoliser les options saoudiennes, a finalement accepté l’apaisement, puis a adopté un modèle relationnel qui reconnaît le fait accompli que l’Arabie saoudite a établi dans l’espoir de contenir un avenir progressif.

Pour sa part, le prince Ben Salmane a expliqué que l’Arabie saoudite souhaite poursuivre ses relations avec l’Amérique pour éviter les coûts et les difficultés liés à la recherche d’une alternative. Il est clair que l’alternative est celle de pays du même poids que les États-Unis, et il ne fait aucun doute qu’il a pris en considération l’armement traditionnel de l’armée saoudienne avec des armes américaines, en plus des systèmes, de la formation et de la langue. Outre ce secteur pétrolier, où il y a une forte présence d’entreprises américaines, ainsi que le volume des investissements saoudiens dans Les marchés américains, qui ont approché les mille milliards de dollars. Tous ces facteurs ont fait que l’éloignement de Washington a été calculé avec prudence et précision, avec la conscience de la gravité des conséquences.

Ce qui est intéressant, c’est le ton optimiste du prince quant à l’opportunité de normaliser les relations avec Israël, qui a reçu un soutien américain enthousiaste et même trop enthousiaste. Il n’est pas nouveau que les administrations américaines successives adoptent les intérêts israéliens d’une manière qui semble aller au-delà de leur souci des intérêts américains. Il est devenu clair que la normalisation avec Israël est l’élément décisif de la nouvelle normalisation avec l’Amérique, elle-même et elle est au cœur de celle-ci.

La normalisation avec l’Arabie Saoudite a un impact exceptionnel en raison du poids exceptionnel de l’Arabie Saoudite, car c’est le pays au poids et à la symbolique arabe et islamique, et c’est un pays en forte émergence au niveau régional et international. Il va sans dire que l’Arabie Saoudite est aujourd’hui le centre de gravité économique et politique du monde arabe.

C’est ce qui a fait qu’Israël pousse Washington à inclure la normalisation saoudo-israélienne dans le cadre de la normalisation saoudo-américaine ! Et s’il y a un obstacle à la normalisation, c’est l’état d’Israël lui-même. C’est Israël qui veut une normalisation libre et qui n’en paie pas le prix avec le pillage arabe, notamment en Cisjordanie. Israël est une entité fondée sur le vol. et le viol de la Palestine, ainsi que d’autres terres arabes, syriennes, libanaises et jordaniennes. Jusqu’à présent, il n’y a aucun signe de son intention de répondre à ces exigences. Le monde arabe est incarné dans un État palestinien qui comprend la Cisjordanie et la bande de Gaza. Par conséquent, la description par le prince Bin Salman de l’accord de normalisation potentiel comme étant l’accord le plus important depuis la fin de la guerre froide reste un sujet de profond doute. Peut-être que la description sera correcte si l’accord réussit à réaliser une percée historique représentée par la résolution du problème depuis ses racines.

La réalité est que la normalisation, avec ses perspectives possibles, ne mettra pas fin au conflit, mais au contraire l’exacerbera et l’approfondira à l’avenir, malgré quelques trêves temporaires. Très probablement, Israël et Washington tenteront d’offrir des concessions secondaires ayant une dimension économique, avec un relâchement temporaire et calculé de l’emprise de l’occupation, comme la réduction du nombre de points de contrôle militaires et de la capacité de déplacement des personnes, avec un plus grand rôle pour l’Autorité palestinienne, accompagnés de déclarations rhétoriques formulées avec une ambiguïté intentionnelle, faciles à éluder à l’avenir et visant uniquement à faire passer le moment de la naissance d’un accord de normalisation non désiré. Populairement, Washington est bien sûr prêt à organiser une cérémonie royale au cours de laquelle il présentera l’accord de normalisation comme s’il s’agissait d’une concession israélienne et d’une victoire arabe.

Il est certain que le bilan trompeur et perfide d’Israël complique la capacité de Washington à vendre le stratagème israélien attendu. À mon avis, nous ne verrons pas de concession israélienne tangible vers la création d’un État palestinien indépendant, même par étapes. Quant aux promesses et aux paroles douces, elles sont disponibles et excessives.

Ici apparaît l’une des faiblesses arabes les plus importantes, représentée par la position de l’Autorité palestinienne, car la faiblesse et l’impatience peuvent la pousser à accepter les miettes et les vagues promesses offertes par la générosité israélienne.

Avec cette tendance, l’Arabie Saoudite fait face à la confrontation et à l’épreuve politique la plus difficile avec Washington, le sponsor paternel et spirituel d’un accord de normalisation qui ne mettra pas fin au conflit même s’il est réalisé, malgré tous les doutes qui indiquent sa difficulté.

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